J’adore le gingembre. Il y en a toujours dans mon frigo ou mon congélateur. Son goût unique et sa puissance en font un ingrédient de choix pour rehausser les plats. Bien que je me sois intéressée à comment pouvait bien pousser cette étrange «racine» (rhizome), je ne m’étais jamais imaginé pouvoir la faire pousser ici, au Québec.
À mes débuts aux Urbainculteurs, j’ai souvenir d’avoir assisté à un colloque sur la culture en serre. À l’époque, une personne de la ferme Au petits oignons était venue présenter ses résultats d’expérience à la suite d’un essai de gingembre en plein sol, en serre. J’étais fascinée! En plus, l’expérience avait été des plus concluantes. C’était donc possible d’envisager cela ici.
Un premier essai difficile
Les années ont passé et je n’ai jamais poussé plus loin cette idée dans le cadre de mon travail ou à la maison. C’était resté de l’ordre de l’expérientiel dans ma tête. Jusqu’au jour où un collègue m’a proposé d’essayer le gingembre à la ferme urbaine afin de l’intégrer à nos mélanges de tisanes. Je me suis dit, pourquoi pas!
Le hic c’est que nous étions déjà assez tard en saison, au mois d’avril. Pour ceux qui ne le savent pas encore, le gingembre met beaucoup de temps à germer (parfois un mois!). Si je voulais le faire germer, qu’il produise quelques feuilles, pour finalement le transplanter rapidement, j’étais assez serrée. Je me suis précipitée dans une épicerie où il y avait du gingembre bio, puis j’ai tenté l’expérience. Quelle catastrophe comme premier essai! Mon gingembre n’a jamais poussé! Moi qui réussis habituellement à merveille tous mes semis, pas besoin de vous dire que ça a été un assez gros coup d’orgueil (mes collègues ont trouvé ça très drôle d’ailleurs!).
Cette belle expérience a fini au compost et je n’y ai plus repensé durant plusieurs mois. À la fin de l’année, une collègue m’a fait cadeau d’une belle quantité de gingembre qu’elle avait cultivé chez elle. Il était tellement délicieux! Je n’avais plus le choix, je devais tenter l’expérience à nouveau l’année suivante, question de mettre un baume sur ce premier échec.
Une deuxième chance
Je m’y suis donc pris un mois plus tôt (début mars). Encore une fois, j’ai acheté du gingembre biologique en épicerie. Ma collègue et moi avons pris soin de sélectionner les morceaux qui avaient le plus de « yeux », signe qu’une pousse à cet endroit précis est envisageable. Nous avons découpé tout cela en morceaux avec un couteau, puis les avons mis individuellement dans des pots de 2 pouces par 2 pouces. Les rhizomes avec « yeux » ont été plantés en surface, légèrement recouverts de terre.
Et puis l’attente commença, et c’était long, ahah! Habituée à cultiver des légumes qui germent entre 3 à 7 jours, autant dire que j’ai trouvé cela interminable. Ne sachant pas trop comment procéder, j’ai mis les plateaux sous les fluorescents dès le début et je m’assurais que le terreau reste légèrement humide même si rien ne sortait. Puis, après près d’un mois d’attente (peut-être plus, je ne comptais plus rendue là), les premières tiges sont sorties! Hourra!
Ce n’était que le début de l’aventure comme on dit. Les petits gingembres se sont déployés tranquillement et de façon très inégale. J’ai gardé le cap et je me suis dit qu’ils feraient leur grande sortie à l’extérieur, dès que les risques de gel seraient passés, et ce, peu importe leur stade d’avancement.
Question de rendre cette expérience encore plus spéciale, nous avons décidé de transplanter le gingembre à l’extérieur, dans les bacs, et non dans la serre. Nous avons appliqué une bonne quantité de vermicompost puis de l’engrais avant de mettre les plants en terre. À la ferme urbaine, nous avons eu la chance de bénéficier d’une commandite pour ce qu’on appelle des tunnels flex. C’est comme si nous placions une petite serre au-dessus de nos bacs avec la possibilité de l’ouvrir par temps chaud. Ne restait plus qu’à attendre, encore.
Les constats
J’ai beaucoup aimé utiliser ces tunnels, il faisait vraiment chaud là-dessous. Le gingembre a poussé et nous avons pu faire une récolte au début de l’automne. Je n’ai pas battu des records de production, mais nous nous sommes bien amusés. Mon constat: Malgré une attente interminable pour la pousse, c’est une culture qui n’a pas vraiment nécessité d’entretien. Ensuite, je crois que j’aurais pu semer encore plus tôt afin d’obtenir des rhizomes de meilleure taille. Aussi, je suis pas mal certaine que ce genre de culture performerait bien dans des pots de géotextile si jamais vous ne pouvez pas recréer l’effet de serre. Grâce à leur couleur, ceux-ci se réchauffent facilement et offrent de bonnes conditions pour ces cultures qui aiment être au chaud.
Voilà donc ma dernière expérimentation pour 2023. J’avais envie de vous montrer que, malgré tout notre bagage horticole, nous faisons parfois des expériences « à tâtons » sans trop nous baser sur la littérature, mais bien pour le plaisir pur et simple d’expérimenter. J’aurai certainement tiré plusieurs leçons sur ma culture de gingembre et je crois que je pourrais m’améliorer encore. Toujours apprendre et peaufiner ses techniques, c’est génial non?
J’en profite aussi pour vous dire que cet article est le dernier que je partagerai avec vous dans le cadre de mes fonctions aux Urbainculteurs. Après 9 années à explorer avec cet organisme qui m’a tant apporté, j’ai fait le choix (non sans un pincement au cœur), de terminer un chapitre et me permettre de nouvelles expériences professionnelles. J’ai réellement adoré faire ces partages avec vous, j’ai toujours aimé conter des histoires.
Bon jardinage et à la prochaine!
Par Marie-Andrée Asselin